Judit Reigl, Le vertige de l'infini: Musée des Beaux-Arts, Rouen

17 Septembre 2021 - 17 Janvier 2022

« [Le corps,] le plus parfait instrument et le plus tragique obstacle. » Judit Reigl

 

Pour sa deuxième édition, le partenariat entre la Fondation Gandur pour l’Art et la Réunion des Musées Métropolitains propose, après Simon Hantaï en 2019, une mise en lumière d’œuvres de jeunesse de Judit Reigl (Kapuvár, Hongrie, 1923 - Paris, 2020).

 

À travers cinq chefs-d’œuvre issus de la collection de la Fondation Gandur pour l’Art, cette exposition se concentre sur les quinze années décisives qui suivent l’arrivée de Judit Riegl à Paris en 1950. Après avoir endurée la précarité et le joug du stalinisme qui la pousse à l’exil, la jeune artiste y retrouve son compatriote et ancien camarade des Beaux-Arts de Budapest, le peintre Simon Hantaï (Bia, Hongrie, 1922 - Paris, 2008). C’est par son intermédiaire que Judit Reigl, passée entre-temps par les ateliers de La Ruche qui accueillent à Paris les artistes sans ressources, rencontre André Breton. Le surréaliste lui offre de présenter ses peintures à la galerie À l’Etoile scellée pour sa toute première exposition personnelle.

 

Les toiles abstraites de cette période procèdent d’une force invisible, d’une écriture automatique. L’artiste n’aura de cesse de cultiver cet héritage du surréalisme et de faire advenir sa peinture comme geste et rythme, pulsion, pulsation élémentaire et cadence.

 

Les deux tableaux de la série Eclatement datés de 1955 et 1956 témoignent d’une peinture faisant la part exclusive au corps, dans un combat forcené avec la matière où le geste devient coup. Une force guide le regard du spectateur au-delà de la toile.

 

Dans les Centres de dominance, la force qui saisit le spectateur est inversée. Pour cette série élaborée entre 1958 et 1959, la peinture est projetée par paquets sur la toile. Elle est ensuite étirée à l’aide d’un racloir sur lequel l’artiste pèse de tout son corps en imprimant un mouvement centripète qui réagrège la matière dispersée – ainsi que l’œil du spectateur – vers le cœur tourbillonnant de la composition.

 

Dans cette seconde moitié des années 1950, avec ces deux séries consécutives, Judit Reigl métamorphose la peinture en un champ de forces. Dès lors, le tableau modélise le fonctionnement de l’univers et nous sommes saisis de vertige, du « Vertige de l’infini ».

 

Une spectaculaire Écriture en masse datée de 1964 et récemment acquise par la Fondation Gandur pour l’Art vient opportunément compléter la sélection. Cette peinture issue d’une suite conçue entre 1959 et 1965, permet d’aborder également la position de Judit Reigl sur la scène internationale de l’art. Si cette œuvre révèle une proximité avec les peintres américains (Still, Rothko, De Kooning) et européens (Matthieu, Schneider, Hartung, etc.), elle illustre aussi l’indépendance et la liberté de Judit Reigl.

 


 

 Site de l'exposition